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La clause d’accroissement est un mécanisme juridique régulièrement utilisé en matière de planification successorale.

Pour rappel, la clause d’accroissement est un contrat aléatoire à titre onéreux entre parties relatif à des biens mobiliers ou immobiliers. La clause d’accroissement nécessite dès lors que les parties qui la concluent aient des « chances équivalentes de gagner ou de perdre », liées à un événement incertain : le prédécès de l’une des parties contractantes.

Lors du décès de l’une des parties contractantes, la clause opère avec un effet rétroactif : la partie survivante reçoit la part de la partie prédécédée. Cette dernière est alors redevable de droits de donation et non de droits de succession. Les droits de donation sont nuls lorsque la clause d’accroissement porte sur des biens mobiliers.

Exemple – A. et B. sont mariés sous le régime de la séparation de biens pure et simple concluent une clause d’accroissement quant au portefeuille de 100.000 € qu’ils ont en indivision. En cas de décès de A., B. récupèrera la part du bien de A. sans payer de droits de succession à condition que le caractère aléatoire du contrat soit bien respecté.
Grâce à la clause d’accroissement, B. devient l’unique propriétaire du portefeuille en payant des droits de donation de 0% car la clause porte sur un bien mobilier.

Attention, le caractère aléatoire et à titre onéreux du contrat sont fondamentaux : il doit y avoir une incertitude quant au bénéficiaire final de la totalité du bien concerné. Pour répondre à cette condition, on remarque dans a pratique que les deux parties participent à concurrence d’un montant différent en fonction de leur âge et de leur sexe (en d’autres termes, en fonction de leur espérance de vie) afin de pouvoir établir la nécessaire incertitude. Toutefois selon Vlabel (l’administration fiscale compétente en Région flamande), une différence dans les chances de survie réciproques des parties ne peut toutefois pas être compensée par une mise inégale. Selon elle, une mise plus importante n’augmente pas les chances de survivre à l’autre partie (Standpunt n°17044 d.d. 28/01/2018 – modifié le 19/09/2018).

Afin de répondre à la condition du caractère aléatoire en répondant aux conditions d’apport différent selon l’âge et le sexe de chacune des parties, il est parfois constaté dans la pratique que la partie qui « doit miser le plus » et, finalement, la partie qui possède le « plus petit patrimoine » et ne sait par conséquent pas toujours apporter le montant nécessaire en vue de répondre au caractère aléatoire de la clause.

Exemple – A. est un homme âgé de 50 ans. Il est marié à B., femme âgée de 40 ans. Selon des calculs actuariels réalisés sur la base de tables de mortalités, il ressort que, pour obtenir les « mêmes chances de gain ou de perte », A. devrait contribuer dans le bien indivis à concurrence de 18,12 %. B. devrait, elle, y contribuer à concurrence de 81,88 %.
Sur un portefeuille de 100.000 €, A. devrait dès lors apporter 18.120 € et B. 81.880 €. B. ne dispose pas de ces liquidités et ne détient qu’un portefeuille mobilier de 50.000 €. A., lui, est à la tête d’une grosse fortune. Il réalise dès lors une donation de 31.880 € (ou plus) à B. afin que celle-ci puisse disposer des fonds nécessaires afin de respecter le caractère aléatoire de la clause d’accroissement qu’ils projettent de conclure entre eux.

Dans une décision anticipée rendue récemment par Vlabel (décision anticipée n°19026 d.d. 08/07/2019), l’administration fiscale flamande qualifie la combinaison entre donation et un contrat aléatoire subséquent d’abus fiscal, justifiant notamment sa décision sur l’unité d’intention qui anime les parties contractantes.  Si le raisonnement réalisé par Vlabel reçoit les critiques de la doctrine sur certains points, la conclusion de sa décision n’est selon nous pas surprenante. Les autres administrations du pays ne se sont – à notre connaissance – pas encore prononcées sur la question mais il ne serait pas étonnant de les voir se prononcer dans un sens similaire si elles étaient appelées à le faire.

Il ne peut dès lors être que fortement déconseillé aux personnes désireuses de combler le caractère aléatoire de la clause d’accroissement par une donation préalable.

 

Maureen Vanfraechem – Juriste chez Pareto