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Le 25 janvier dernier était déposée une proposition de loi visant à réformer notre droit successoral. Bien que quelques adaptations ont pu être observées ces dernières décennies en la matière, le droit successoral comme nous le connaissons actuellement trouve ses origines dans le modèle de la société tel qu’il se présentait au jour de la conception du Code civil, c’est-à-dire au 19ième siècle…

Deux siècles plus tard, notre société a manifestement évolué. Le modèle familial a été bouleversé, notamment avec la notion de cohabitation ainsi qu’avec le nombre croissant de familles recomposées. La nature du patrimoine familial a également considérablement changé. Alors qu’il était autrefois principalement immobilier et transmis de génération en génération, il se diversifie de plus en plus aujourd’hui. Par ailleurs, les perspectives de transmissions sont actuellement différentes.

En outre, l’espérance de vie croissante change la donne. En effet, nous héritons aujourd’hui généralement à un âge où notre situation financière est plus confortable.

Ces différents éléments ont poussé le législateur à repenser le système successoral afin de rééquilibrer les intérêts du conjoint avec ceux des enfants et, surtout, donner plus de latitude pour disposer librement de ses avoirs.

Comme il s’agit d’une proposition de loi, elle doit maintenant suivre la voie parlementaire usuelle. Le Ministre de la Justice, Koen Geens, a émis le souhait que celle-ci soit adoptée cette année encore.

Quels sont les points principaux de cette réforme et qu’est-ce qui change concrètement ?

1. La notion de réserve et l’équilibre familial

Tout le monde sait qu’en Belgique, on ne peut pas déshériter certains de nos héritiers. Nous connaissons en effet dans notre droit des héritiers dits réservataires (enfants, conjoint, parents). La proposition de loi commentée prévoit de modifier les règles relatives à la réserve. En voici quelques points.

  • La réserve des descendants sera dorénavant limitée à 50% du patrimoine et ne sera donc plus fonction du nombre d’enfants du défunt. Cela signifie que le défunt pourra disposer plus librement de ses avoirs. Ceci peut s’avérer particulièrement important en présence d’enfants nécessitant des soins plus importants, de partenaires non mariés, de beaux-enfants, etc.
  • En compensation de ceci, la loi permettra aux enfants autant que possible de recevoir leur part héréditaire non grevée de l’usufruit du conjoint.
  • La réserve des ascendants sera supprimée pour laisser place à une aide alimentaire obligatoire si les parents se trouvent dans une situation de besoin au jour du décès de leur enfant.
  • La réserve en nature (principe selon lequel la réserve de l’héritier s’applique au prorata sur l’ensemble des biens du défunt) est remplacée par une réserve en valeur (principe selon lequel la réserve de l’héritier réservataire a droit à une quote part de la valeur totale des biens de la succession).

2. Valorisation des biens donnés – Le rapport

Lors du rapport des biens donnés, la valorisation de ceux-ci se réalisera en fonction de leur valeur au jour de la donation, indexée par rapport au jour du décès, peu importe la nature des biens concernés. Il existe en effet actuellement une inégalité de traitement en fonction de la nature des biens donnés. Pour des biens mobiliers, la valeur à rapporter dans la succession est celle au jour de la donation. Pour des biens immobiliers, il s’agit de rapporter le bien en nature, tenant compte de la valeur au jour du décès. Si trente ans s’écoulent entre la donation et le décès, 100.000 € donnés à l’époque à chaque enfant (le premier ayant reçu des liquidités et le second un bien immobilier ayant à l’époque la même valeur) ne vaudront certainement plus la même chose au jour du décès. L’équité respectée au jour de la donation engendrera dès lors une inégalité (souvent involontaire) au jour du décès.

3. Assouplissement de l’interdiction des pactes sur succession future

Un pacte sur succession future est une convention par laquelle le futur défunt décide aujourd’hui, de son vivant, avec ses héritiers comment ses biens seront partagés après son décès. Sauf ceux expressément autorisés par la loi, notre droit interdit actuellement ce genre de pactes afin notamment d’éviter des situations de chantage et/ou de pressions qui pourraient apparaître entre les différents intervenants.

Cette interdiction de principe sera maintenue mais assouplie dès lors que, notamment, un pacte successoral global entre les parents et les enfants pourrait voir le jour. L’intérêt de ce pacte est, pour les parents, de pouvoir régler avant leur décès, l’attribution et le partage de leur succession avec leurs enfants. Cet accord serait donc contraignant pour les enfants et aurait entre autres pour but d’éviter des conflits suite au décès des parents.
Il est prévu que ce type de pacte sur succession sera fort encadré par la loi. Il est notamment prévu qu’il devra être notarié et comporter un délai de réflexion de minimum un mois car une fois le pacte signé, plus aucun recours ne pourra être envisagé après le décès.

Conclusion 

Nous ne pouvons que nous montrer positifs face à une telle avancée législative qui s’adapte aux besoins qui évoluent sans cesse dans la société dans laquelle nous vivons. Cependant, cette matière reste complexe et peu attrayante vu qu’elle force les personnes à se pencher sur leur propre décès.

Par contre, grâce à cette réforme et en combinaison avec un accompagnement en matière de planification successorale pointu, bien des conflits entre héritiers pourraient être évités.