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L’usufruit

À titre préliminaire, l’article 3.138 du Code civil définit à présent l’usufruit de la manière suivante : « L’usufruit confère à son titulaire le droit temporaire à l’usage et à la jouissance, de manière prudente et raisonnable, d’un bien appartenant au nu-propriétaire, conformément à la destination de ce bien et avec l’obligation de restituer celui-ci à la fin de son droit ». Il en découle que l’usufruitier a un droit d’usage et de jouissance sur la chose grevée de son usufruit. Juridiquement, on dit alors qu’il dispose de l’usus (c-à-d l’usage de la chose) et du fructus (c-à-d les fruits de la chose). Le droit de disposition revient alors traditionnellement au nu-propriétaire. Ce droit garantit à son titulaire un pouvoir d’aliénation. En termes juridiques, on dit qu’il dispose de l’abusus (c-à-d la disposition de la chose). Dans cette vision classique, il en résulte que l’usufruitier ne pourrait aucunement être habilité à vendre le bien.

Dans certaines situations particulières, l’usufruitier peut toutefois aliéner les biens sur lesquels portent son usufruit avec, néanmoins, une obligation de restitution à l’extinction de l’usufruit.

Le quasi-usufruit

Par le passé, le Code civil accordait déjà un droit de disposition à l’usufruitier, il était toutefois limité au régime très spécifique du « quasi-usufruit ». Plus concrètement, le quasi-usufruit est un usufruit qui porte sur un bien consomptible, c’est-à-dire un bien dont on ne peut pas faire usage sans le consommer. À titre d’exemple, comment faire pour jouir d’une cave à vin sans en boire les bouteilles ? Comment jouir d’un compte en banque sans dépenser de l’argent ? Dans cette situation particulière, l’usufruitier était donc autorisé à aliéner le bien grevé du droit d’usufruit.

Le droit de disposition fonctionnel

Aujourd’hui, le Code civil, en son article 3.148, accorde désormais à l’usufruitier un véritable droit de disposition fonctionnel et ce, dans trois situations particulières et limitatives :

  1. Une disposition légale particulière l’y autorise (l’on vise ici l’exception légale) ; ou
  2. L’usufruit concerne des biens consomptibles (l’on vise ici le « quasi-usufruit » – voir supra) ; ou
  3. Cela correspond à la destination des biens qui existait déjà au moment de la constitution de l’usufruit ou qui est stipulée contractuellement entre les parties et que cela s’inscrit dans le cadre de son obligation d’administration prudente et raisonnable du bien (l’on vise ici l’exception conventionnelle).

Outil de planification patrimoniale

La dernière hypothèse est celle qui ouvre dorénavant la voie à une meilleure planification patrimoniale, en ce qu’elle permet d’étendre le droit de disposition à d’autres choses que des biens consomptibles, comme c’était uniquement le cas par le passé. En effet, les parties à une donation avec réserve d’usufruit pourront à présent définir conventionnellement ce qu’ils entendent par « la destination des biens » visés par l’usufruit.

À titre d’exemple, on pourrait citer le propriétaire d’un immeuble de rapport composé de différentes unités qui envisage de donner celui-ci à ses enfants tout en s’en réservant l’usufruit. Il souhaite toutefois garder un pouvoir de gestion sur celui-ci (louer ou vendre certaines unités après la donation). Conventionnellement, il sera à présent possible de définir quelle sera la destination du bien (notamment un immeuble de rapport). Le même raisonnement pourrait également s’appliquer à un portefeuille d’investissement.

Attention que ce nouveau droit n’est pas pour autant absolu, dans le sens où il ne s’exerce pas sans contrepartie pour l’usufruitier. En effet, son usage implique toujours une obligation de restitution à l’extinction de l’usufruit, une obligation de respect de la destination du bien ainsi qu’une obligation d’administration prudente et raisonnable du bien. Cette notion étant en outre relativement nouvelle, ses contours devront encore, dans le futur, être mieux définis par la pratique et la jurisprudence.

N’hésitez pas à prendre contact avec Pareto si vous désirez en savoir plus sur cette technique de planification.

 

Olivier Doms – Juriste et fiscaliste chez Pareto SA.

Article rédigé le 1er juillet 2024.